La pratique du finning consiste à découper l’aileron d’un requin vivant, de rejeter le requin à l’eau et de ne garder que l’aileron. C’est est une pratique à la fois cruelle du point de vue du bien-être animal et irresponsable du point de vue des objectifs de conservation des espèces. Les requins jouent un rôle majeur dans les écosystèmes et certains sont des espèces en danger inscrites sur les listes de la CITES (La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction).
Cela fait plusieurs décennies que l’Union européenne tente de lutter contre cette pratique. Un premier règlement de 2003 avait officiellement interdit la pratique. En 2013, un nouveau règlement européen avait interdit le débarquement d’ailerons et autorisait uniquement le débarquement de requins entiers, avec les ailerons attachés naturellement.
Ces règlements sont une très bonne chose mais demeurent insuffisants pour garantir une vraie protection des requins. L’Union européenne reste en effet l’une des principales plaques tournantes du commerce d’ailerons de requins et de nombreux requins continuent d’être tués massivement pour alimenter le commerce des ailerons de requins.
Le fait qu’il existe encore un commerce légal d’ailerons de requins rend très facile le blanchiment des ailerons illégaux, qu’ils s’agissent d’ailerons issus du finning ou d’ailerons d’espèces protégées. Il est en effet très coûteux d’identifier de quelle espèce il s’agit une fois que l’aileron est découpé. Sans qu’on puisse le savoir, des ailerons d’espèces protégées et dont le commerce est interdit, continuent à être échangés dans l’UE.
C’est ce constat qui a amené plusieurs organisations à lancer une initiative citoyenne européenne. En quelques mois, la pétition a atteint le seuil d’un million de signatures nécessaire pour être validée. La pétition demandait l’interdiction du commerce d’ailerons de requins dans l’UE.
Il est utile de comparer la question du commerce des ailerons de requins avec celle de l’ivoire. Pour mettre fin à l’hécatombe que subissaient les éléphants, on ne s’est pas contenté·e·s d’interdire le fait de retirer ses défenses à un éléphant. On a totalement interdit le commerce d’ivoire. Pour mettre fin à l’hécatombe dont les requins sont victimes, il faut aujourd’hui faire de même et interdire le commerce d’ailerons de requins.
Plusieurs pays comme le Canada, le Royaume-Uni ou les États-Unis ont fait le choix d’interdire le commerce d’ailerons de requins. L’UE doit leur emboîter le pas.
De la collecte des signatures jusqu’à la réponse de la Commission, j’ai soutenu cette initiative et mon équipe a conseillé les auteur·trice·s de l’initiative sur la manière d’aborder les différentes étapes du processus. Début juillet 2024, la Commission européenne a fait part de sa réponse officielle à l’initiative citoyenne. Sans s’engager quant au résultat final, la Commission européenne a décidé de lancer une étude d’impact pour rendre compte de la réalité en collectant plus de données et prévoir l’impact d’une interdiction du commerce d’ailerons de requins. Le combat pour les requins ne fait donc que commencer !