Le port de Sète est le premier port européen en matière d’exportation d’animaux. Chaque année, pas moins de 37 millions de bovins, ovins, porcins et chevaux, ainsi que un milliard de volailles transitent par le port de Sète.
Après avoir tenté, cet été, d’accéder au port de Sète pour observer les conditions de transport et de transit des animaux, j’ai finalement été refoulée par les services de sécurité. Le port de Sète aurait-il quelque chose à cacher ?
ONG et médias dénoncent la maltraitance animale
La diffusion du reportage d’Envoyé Spécial « Le calvaire des animaux » le 3 septembre dernier a été un électrochoc pour beaucoup, et n’a malheureusement fait que confirmer nos soupçons déjà existants. Les ONG ne cessent de dénoncer les conditions d’élevage ou d’abattage des animaux, mais elles pointent aussi du doigt leurs conditions de transport, à raison. Dans cette enquête menée par les journalistes Alexandra Colineau, Julie Ledru et Marie Dubois, on y voit des images infiltrées filmées en 2019, qui montrent clairement que les régulations européennes existantes ne sont pas respectées.
Pour des raisons de rentabilité économique, « le port de Sète promet à ses clients un rythme de charge de 300 animaux par heure », alors pour respecter ces temps donnés les dockers frappent les animaux à coups de bâton et à coups de pied, ce qui est absolument interdit par la régulation européenne. Alors qu’il fait 38°C à l’extérieur, les animaux sont transférés vers des camions en tôle où on peut aisément imaginer que la température y est encore plus élevée. Pourtant, la température maximale autorisée par l’Union européenne est de 30°C.
Port de Sète certifié « bien-être animal » ?
Face à ces accusations, le port de Sète se vante d’être le premier port à avoir reçu le label « bien-être animal » en Europe. Comment cela est-il possible ?
En réalité, ce n’est pas le port directement mais un hangar à bétail qui a été construit en 2018, qui a été labellisé « bien-être animal ». Ce hangar high-tech a été construit par l’entreprise SEPAB, pour la somme totale de 3 millions d’euros. En théorie, il permettrait aux animaux d’être débarqués du camion puis mis dans ce beau hangar avec eau, ombre et nourriture, pour s’y reposer après des trajets de plusieurs heures. L’entreprise présente ce hangar de 4400 m² comme un moyen d’ « optimiser la qualité d’accueil du bétail sur le port dans un souci permanent d’améliorer le bien-être animal ».
Problème ? Ce hangar n’est pas utilisé, car il faut payer pour l’utiliser ! Il est donc bien plus rentable pour les transporteurs de décharger directement du camion au bateau et inversement, ce qui leur permet une économie de temps et d’argent, au détriment du bien-être réel des animaux.
Faire respecter les régulations européennes
Une législation européenne claire et définie existe, l’enjeu est donc de la faire respecter. En tant qu’euro-députée, je suis membre de l’Intergroupe animal au sein du Parlement européen. Ensemble, nous avons obtenu une grande victoire politique : cet été a été créée la première Commission d’enquête sur le transport des animaux, dont je suis la coordinatrice et qui débutera ses travaux dès le 21 septembre.
Chaque année, près de 1,5 milliard d’animaux sont transportés pendant des jours entiers à travers l’Union européenne et vers des pays tiers. Pendant un an, dans le cadre de cette Commission d’enquête, nous auditionnerons les expert·e·s, les associations de défense des animaux, les entreprises de transport. Nous nous rendrons aussi sur le terrain, partout en Europe, pour rendre compte des souffrances des animaux. Nous voulons obtenir une amélioration des conditions de transport, et leur interdiction sur les trop longues distances.
Je retournerai donc au port de Sète, avec la ferme intention de mettre au jour les exactions commises par les transporteurs à l’encontre du bien-être animal, et de faire appliquer la législation européenne en vigueur.