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Penser et accompagner l’avenir de la filière pêche : ma mission en Bretagne

Cette année 2024 a notamment débuté par un déplacement de deux jours en Bretagne, à la rencontre des acteurs et actrices de la filière pêche et du sauvetage des animaux marins. 

Le jeudi 11 janvier, je suis allée à la rencontre de  Samuel Durand, ostréiculteur à St Philibert avec qui j’avais déjà eu la chance de m’entretenir à Bruxelles. Il a fondé la Fédération conchylicole, dont le but est de fédérer la profession. L’exploitation ostréicole de M. Durand est une entreprise à échelle humaine comptant peu de salariés et dont l’élevage est principalement constitué de Crassostrea Gigas, une huître creuse sélectionnée pour la qualité de sa chair, des huîtres naturelles (des “diploïdes”) qui ne subissent pas de stérilisation artificielle . Les huîtres grandissent dans les parcs sur une durée de 3 à 4 ans. Samuel est engagé dans une démarche durable. La particularité de la production d’huîtres, selon les techniques, est qu’elle est bénéfique pour l’environnement marin: les huîtres filtrent l’eau et capturent le carbone. Elles ont un bilan carbone très intéressant. A consommer sans modération, donc ! 

Nous avons évoqué divers sujets comme la crise importante qu’ont traversé les ostréiculteurs à Noël, en raison de la contamination des eaux aux bactéries. Des crises successives de ce type sont venues ébranler la profession : la crainte est forte que la demande chute lors des prochaines fêtes de fin d’année. Or, ces ventes sont cruciales pour la réalisation du chiffre d’affaires annuel des ostréiculteurs. 

La profession est particulièrement vulnérable à la qualité de l’eau et aux pollutions diverses, sur lesquelles elle ne peut pas avoir de prises. L’une des grandes priorités pour les ostréiculteurs est donc la législation sur la qualité de l’eau et sa mise en œuvre. N’oublions pas que l’huître fait figure de sentinelle de la contamination de nos eaux… Cette crise illustre l’urgence d’agir, tant pour l’ostréiculture que pour notre santé et l’environnement.

 

Le lendemain, vendredi 12 janvier, direction le Sea Shepherd Rescue Center, qui est le premier centre de soins de l’ONG Sea Shepherd pour la faune sauvage. C’est un projet récent, qui fête sa première saison d’ouverture. Bien que les soigneur·euse·s et les bénévoles soient en train de finaliser les travaux, le centre peut déjà accueillir des animaux marins (des oiseaux marins jusqu’aux phoques) et terrestres (oiseaux, chauves souris, hérissons, renards, sangliers…).

Les 2 responsables du centre, soigneurs animaliers, nous ont montré plusieurs Goélands ainsi qu’une chouette effraie. C’est une période de calme, mais le centre avait récemment reçu une dizaine de fous de bassans, des oiseaux marins menacés. Le travail de soin de Sea Shepherd est absolument crucial pour protéger les espèces menacées et compléter les deux centres de soin déjà présents en Bretagne. Plus largement, les centres de soins pour la faune sauvage sont en nombre totalement insuffisant sur le territoire français.

 

Je me suis ensuite rendue à la rencontre de sept Ligneurs de la Pointe de Bretagne à Sainte Marine, dans le pays bigouden. Les ligneurs emploient des engins de pêche comme des lignes à main.

Tous m’ont expliqué être confrontés à d’importantes difficultés depuis que l’Union européenne a instauré des quotas sur le lieu jaune fin 2023. Pourtant, ces pêcheurs  alertent depuis longtemps sur la situation du lieu jaune; ils ont proposé des mesures pour reconstituer les populations. Or, ils m’ont expliqué ne pas se sentir écoutés. La plupart d’entre eux n’ont pas le droit à leur part des quotas, parce que l’Etat français ne les distribue pas correctement. Il faut en effet savoir que ce sont les les organisations de Producteurs (OP) qui les distribuent mais ils ne les distribuent pas sur la base de critères sociaux (notamment des critères d’âge, la plupart des pêcheurs rencontrés sont des jeunes) et / ou environnementaux (la pêche à la ligne est la technique qui a l’impact le plus faible). Certains ligneurs se sont même vu refuser l’adhésion à l’OP ! Ceux qui choisissent de ne pas y adhérer n’ont tout simplement pas le droit de pêcher le lieu (hors OP = zéro quota). 

Ainsi, le risque est fort que les petits pêcheurs qui ont les méthodes de pêche les plus responsables ne finissent par abandonner le secteur. Deux jeunes pêcheurs que j’ai rencontrés risquent par exemple de finir sur le bord de la route, faute de solution. Les ligneurs ont pu me décrire les différentes difficultés (parfois absurdes) qui mettent en péril leur activité ou les empêche carrément de travailler en ce début d’année : or, pour certains, le lieu jaune représente jusqu’à 75% du chiffre d’affaires !

 

 

L’après-midi, je me suis rendue à la rencontre de l’interprofessionnelle de Loctudy, qui rassemble divers métiers de la pêche (pêcheurs hauturiers, mytiliculteurs, algoculteurs etc) pour lutter pour le maintien du port de Loctudy et de son activité.  

La structure du port est gérée par la CCI qui dresse un constat alarmant sur la situation financière et budgétaire, notamment en raison de la baisse des volumes qui y sont débarqués. Or l’interpro qui tente de sauver le port m’a expliqué que les rapports de la CCI étaient peu transparents, qu’ils avaient demandé à voir les informations sur l’activité du port sans jamais les obtenir. Ainsi, la CCI a fait une étude mandatée auprès d’un cabinet mais l’interpro en attend toujours les conclusions. Le port de St Guénolé se trouve dans la même situation. 

Les élus locaux quant à eux proposent des solutions comme la suppression de la vente sous criée qui ne semble pas viable pour les mareyeurs. 

C’est pourquoi, afin de sauver leur port, les membres de l’interpro ont travaillé à une feuille de route alternative qu’ils m’ont soumise. Ils défendent la conservation la pêche en s’orientant vers une pêche durable, la valorisation des produits locaux, le développement d’un tourisme tourné vers les activités traditionnelles, en redynamisant les infrastructures portuaires, etc

Ce rendez-vous pose la question du modèle de pêche que nous défendons : le port étant de taille moyenne, il permet à la pêche côtière de débarquer, certains pêcheurs petits métiers sont d’ailleurs en attente de la construction d’un ponton. Aussi, il génère des emplois pour 300 personnes (un marin induit 4 à 5 emplois à terre). La fermeture de petits et moyens ports n’est jamais une bonne chose pour nos territoires. Maintenir un écosystème portuaire basé sur un ensemble de ports permet de limiter les risques et de travailler sur des circuits courts.

 

 

Suite à ces échanges et rencontres, je me suis rendue à Lorient à l’invitation du groupe écologiste local. Après une conférence de presse, je suis intervenue sur l’avenir de la filière pêche en Bretagne et l’absurde projet Ker’Oman (sur lequel j’ai publié une tribune avec Marie Toussaint, que vous pouvez trouver ici). Je tiens à remercier Damien Girard, Chef de file de l’opposition de gauche et écologiste à Lorient, pour le travail effectué quant à cet événement.

Les débats ont rassemblé plusieurs centaines de personnes et furent très vifs, preuve qu’il nous faut continuer de nous battre pour la transition du secteur de la pêche, pour qu’elle soit enfin durable et juste. J’ai pu expliquer mon travail au Parlement européen en ce sens lors d’une table ronde avec Didier Gascuel, David Le Quintrec et Charles Braine. 

 

 

Nous avions des désaccords mais aussi des accords sur les constats. J’ai partagé ma vision d’une transition juste, notamment au sujet de la répartition des quotas. Les débats ont aussi porté sur notre modèle de consommation qui doit évoluer pour que nous consommions moins et mieux pour réduire nos dépendances aux importations, les mesures pour pêcher plus durablement et augmenter les captures et revenus des pêcheurs, le travail sur les prix (pas suffisamment hauts pour rémunérer les pêcheurs), les circuits courts, le soutien à des projets de petits et moyen port comme Loctudy pour avoir une diversité de port et préserver la petite pêche côtière etc. 

 

 

Merci à toutes et à tous pour ces échanges animés et constructifs ! J’ai été heureuse de pouvoir proposer des pistes face aux impasses du modèle actuel.  Je repars vivifiée de ces rencontres et prête à rendre 2024 toujours plus écologiste sur terre et sur la mer !

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