Depuis la conclusion d’un accord entre l’Union européenne et le Royaume-Uni en décembre 2020, suite au Brexit, le Parlement européen étudie avec soin l’accord de plusieurs centaines de pages. S’il est appliqué de manière provisoire depuis début janvier, il faut encore le feu vert du Parlement européen afin de l’appliquer directement.
La pêche a été le dernier sujet des négociations sur lequel il y a eu un accord, non seulement parce que c’est un sujet complexe mais aussi parce qu’il y avait une grande importance politique symbolique. Dans ce secteur comme dans la plupart des secteurs, la meilleure situation aurait bien sûr été celle d’un maintien du Royaume-Uni dans l’UE.
Je me suis félicitée du fait qu’il y ait un accord. L’absence d’accord aurait été catastrophique d’un point de vue économique et écologique. Sans accord, les navires européens auraient perdu tout accès aux eaux britanniques et il n’y aurait pas eu de mécanismes conjoints pour fixer les quotas. Le déplacement de certains grands navires européens et l’absence d’accord sur les quotas aurait ainsi accentué le risque de surpêche.
De bons objectifs mais difficiles à appliquer
L’accord conclu fixe des objectifs corrects comme la lutte contre la surpêche (l’objectif d’exploiter les stocks de poisson au niveau du RMD est mentionné). Il y a aussi un accord sur le fait que ce sont les données scientifiques du CIEM qui seront utilisées et, qu’en cas d’absence d’accord, les quotas seront fixés temporairement au niveau des recommandations scientifiques.
Les choses se compliquent lorsque nous devons déterminer si les mécanismes mis en place pour atteindre ces objectifs seront suffisants et efficaces, notamment après 2026.
L’accord prévoit en effet que, d’ici 2026, une partie des quotas qui étaient habituellement attribués aux européens, seront attribués au Royaume-Uni. Ça représenterait une réduction de 25 % des captures réalisées par les navires européens dans les eaux britanniques. En annexe de l’accord, les pourcentages de répartition, année par année, espèce par espèce, sont précisés.
Après 2026, la part des quotas attribuée à l’UE et au Royaume-Uni sera entièrement rediscutée chaque année. La question de savoir ce qui reviendra au Royaume-Uni et ce qui reviendra à l’UE sera rouverte chaque année. Ce type de mécanisme représente selon moi un vrai danger car il ne facilite pas le fait que les quotas soient fixés à des niveaux conformes aux recommandations scientifiques.
L’application de l’accord dépend de chaque gouvernement.
La baisse de la part des quotas qui revient à l’Union européenne fait couler beaucoup d’encre. Quand on sait que certains pêcheurs réalisent jusqu’à 70 % de leurs captures dans les eaux britanniques, on comprend que la baisse de 25% peut représenter beaucoup et mettre certains pêcheurs en danger.
Selon moi, plus que cette baisse de 25%, la question est de savoir comment chaque état va appliquer la baisse. Est-ce que tout le monde sera touché de la même façon ou va-t-on donner, au contraire, la priorité à certains segments de la flotte ?
Je défends le fait que le gouvernement français utilise l’article 17 de la PCP, qui donne la possibilité aux états de donner la priorité à la pêche artisanale, aux pêcheurs qui respectent l’environnement ou qui ont un impact social et économique positif, dans l’attribution des possibilités de pêche.
Réduisons les quotas dédiés à la pêche industrielle, qui pille les mers et ne bénéficie que marginalement à l’économie locale.